Communiqué de presse
Les entreprises suisses ont accru leurs investissements dans le développement durable – climat doit être intégré dans la stratégie
Zurich/Genève, le 30 janvier 2023
Moins de la moitié des cadres dirigeants des entreprises suisses considère le changement climatique comme l’un des trois thèmes les plus importants. En outre, selon le Deloitte 2023 CxO Sustainability Report, les directions d’entreprise en Suisse sont plus pessimistes en comparaison internationale : plus d’une sur trois table sur d’importants effets à long terme du changement climatique et plus d’une sur cinq ne pense pas qu’une croissance économique soit compatible avec la réalisation des objectifs climatiques. Trois quarts des entreprises suisses ont investi bien plus de ressources dans le développement durable l’an dernier. Il est pourtant indispensable d’ancrer encore beaucoup plus systématiquement les considérations climatiques dans toutes les activités des entreprises.
L’an dernier, les entreprises du monde entier se sont trouvées confrontées à de nombreux défis, dont les incertitudes économiques, les conflits géopolitiques, la perturbation des chaînes d’approvisionnement et la pénurie de personnel qualifié. Le cabinet d’audit et de conseil Deloitte a interrogé en 2022 plus de 2’000 membres de comités de direction (CxO) dans 24 pays – dont la Suisse – sur la manière dont ils perçoivent les effets du changement climatique et sur les réactions de leurs entreprises à ce phénomène.
En Suisse, le changement climatique se classe au troisième rang des défis : 40% des personnes interrogées l’ont mentionné comme l’une des trois principales priorités à un horizon d’un an, contre 42% des personnes interrogées à l’échelle mondiale. Seuls les problèmes de chaînes d’approvisionnement (44%) et les incertitudes économiques (44%) ont été classés plus haut dans la liste de priorités des CxO suisses.
Investissements accrus en faveur du climat
Dans les décisions d’investissement, le changement climatique semble être néanmoins un facteur important pour les entreprises suisses : au total, 75% d’entre elles (au pair avec le chiffre mondial) ont accru leurs investissements en matière de développement durable. 28% (19% à l’échelle mondiale) indiquent même que leurs investissements ont augmenté de façon significative (plus de 20% en l’occurrence) [cf. graphique 1]. L’an dernier, presque toutes les personnes interrogées ont fait état d’effets négatifs du changement climatique sur l’entreprise en question. Les entreprises suisses ressentent davantage la pénurie de ressources, les coûts de l’atténuation du changement climatique et de la régulation des émissions ainsi que la pression des actionnaires et de la société que la moyenne mondiale.
« Il y a toujours un grand écart entre ce que font les entreprises et ce qui ressort de leurs efforts au final. Les entreprises suisses tardent trop à inscrire le développement au cœur de leur stratégie, de leurs produits et services, de leurs processus opérationnels et de leur culture d’entreprise », déclare sur un ton critique Liza Engel, Chief Sustainability Officer et membre de la direction de Deloitte Suisse. « En Suisse, les cadres dirigeants sont nombreux à se montrer sceptiques quant à la capacité de la société à résoudre la crise climatique. Ils se sont trop longtemps concentrés sur l’adaptation de leurs activités existantes pour les rendre durables, au lieu de complètement transformer leurs modèles d’affaires, de miser pleinement sur le développement durable et de profiter ainsi des opportunités encore importantes qui s’offrent à eux. Le futur appartient à ceux qui y parviendront. »
Les cadres dirigeants doutent du sérieux
Interrogés sur le sérieux avec lequel le secteur privé aborde la question du changement climatique, seuls 12% des cadres dirigeants suisses ont déclaré qu’il le faisait « très sérieusement », contre 29% à l’échelle mondiale. Dans notre pays, seuls 20% estiment que les organismes publics s’attèlent « très sérieusement » à la problématique, contre 28% à l’international [cf. graphique 2]. Sur la possibilité de prévenir les pires effets du changement climatique et de concilier la croissance économique avec la réalisation des objectifs climatiques, les réponses positives en Suisse sont là encore nettement en retrait par rapport au chiffre mondial.
Les entreprises suisses ressentent certes la pression exercée par une multitude de parties prenantes pour les amener à faire quelque chose pour lutter contre le changement climatique, mais les valeurs sont inférieures dans toutes les catégories par rapport aux chiffres mondiaux. Les parties prenantes considérées comme les plus influentes par les entreprises suisses sont les autorités, la société civile et leur propre conseil d’administration.
Les cadres dirigeants suisses ressentent beaucoup moins de pression de la part de leurs collaborateurs activistes ou des banques que les personnes interrogées au niveau international. « Les entreprises doivent se garder de sous-estimer l’importance du secteur financier pour la transition vers la réalisation des objectifs du net zéro : les banques, les assurances et les gérants de fortune sont de plus en plus tenus d’indiquer les émissions de gaz à effet de serre liées à leurs produits financiers. Ces obligations accroissent la pression sur les entreprises de l’économie réelle », explique Reto Savoia, CEO de Deloitte Suisse. « En outre, les entreprises ont aussi besoin de crédits et requièrent des plans d’affaires rigoureux pour réussir la transition. »
Combattre la méfiance et utiliser la technologie
Interrogées sur les mesures déjà prises, les entreprises suisses indiquent le plus fréquemment utiliser des machines à haute efficacité énergétique (63%), accroître de façon générale l’efficacité énergétique (59%), former leurs collaborateurs sur le thème du changement climatique (53%) et réduire les voyages en avion (53%). Liza Engel conseille aux entreprises d’investir de manière ciblée dans des solutions technologiques : « Les technologies climatiques de toute nature vont jouer un rôle déterminant dans le futur. Les entreprises doivent s’interroger en permanence sur les technologies dans lesquelles il convient d’investir et se demander comment utiliser ces dernières efficacement. Plus les entreprises attendent avec les investissements requis, plus cela leur coûtera cher en définitive. »
Les organisations peuvent aussi combattre la méfiance largement répandue ainsi que les soupçons souvent exprimés d’écoblanchiment. « Les entreprises doivent veiller à publier des données pertinentes et fiables sur les mesures prises et à être toujours parfaitement au fait de toutes les exigences réglementaires. Le soutien public apporté aux mesures politiques de lutte contre le changement climatique et les mécanismes de lutte contre l’écoblanchiment et la tromperie créent également un climat de confiance auprès de la clientèle et dans le public », explique Liza Engel. Elle recommande par ailleurs d’impliquer le conseil d’administration et de garantir que ses membres acquièrent le savoir spécialisé requis. Liza Engel donne aussi cet autre conseil aux cadres dirigeants : « Influencez et autonomisez toutes vos parties prenantes internes et externes sans oublier, chose importante, les sous-traitants. »
L’inquiétude et le fatalisme : un signal d’alerte
« L’inquiétude des cadres dirigeants à propos du changement climatique et le certain fatalisme observé sont pour moi un signal d’alerte. Nous devons poursuivre résolument dans la voie empruntée et intégrer les considérations en matière de développement durable dans toutes les décisions d’entreprise, et ce, à tous les niveaux. J’ai la conviction que le secteur privé suisse dispose du savoir nécessaire ainsi que des possibilités techniques et financières. Grâce à notre économie forte et innovante, à l’excellence des centres suisses de formation et de recherche et à de bonnes connexions internationales, nous avons les meilleurs atouts pour y parvenir », affirme Reto Savoia.
À propos du Deloitte 2023 CxO Sustainability Report :
Le rapport est basé sur une enquête réalisée auprès de 2’016 cadres dirigeants de niveau C (direction). En Suisse, il s’agissait de 75 membres de comités de direction d’entreprises réalisant un chiffre d’affaires annuel de plus d’un demi-milliard de dollars. Toutes les branches importantes en Suisse étaient représentées proportionnellement dans l’échantillon. L’enquête s’est déroulée dans 24 pays en septembre et octobre 2022. 48% des personnes interrogées provenaient de la zone Europe / Moyen-Orient / Afrique, 28%, d’Amérique du Nord et du Sud et 24%, de la zone Asie-Pacifique. L’équipe de l’étude a également procédé à des interviews personnelles ciblées avec des leaders mondiaux de différentes branches.