Point de vue
Mobiliser des financements pour accélérer la transition agricole
Article co-écrit par Maxime Ghafari, manager, Aurore Ungerer, manager, et Fanny Lange, directrice dans les équipes Sustainability de Deloitte France.
La nécessité d’accélérer la transition vers des systèmes agricoles et alimentaires durables fait aujourd’hui l’unanimité. Alors que des projets de grande envergure se multiplient sur le terrain, les montants consacrés à la transition alimentaire restent parfois trop anecdotiques, pas encore suffisamment fléchés ou peu accessibles : sur les 41 milliards d’euros investis chaque année dans la chaîne alimentaire, moins de 1% des investissements seraient destinés exclusivement à des projets durables1.
Nos convictions
La transition agroécologique ne pourra se faire sans un financement structuré, adapté et équilibré entre tous les maillons de la chaîne agricole et alimentaire. Les investissements financiers sont un catalyseur pour accélérer la transformation durable du système agricole et alimentaire.
Une nouvelle équation économique est donc à construire, entre les acteurs des filières bien évidemment, mais aussi avec les acteurs publics, les acteurs financiers et le consommateur. Elle repose sur :
- Un partage des risques entre l’ensemble des acteurs de l’écosystème : les agriculteurs ne peuvent et ne doivent plus assumer seuls les risques et les coûts associés à la transition.
- Une mutualisation des ressources pour déployer des projets durables à grande échelle.
Les facteurs clés de succès
Pour réunir toutes les conditions de succès de cette transition et dépasser les freins qui persistent, il est essentiel selon nous de :
Mutualiser les efforts en favorisant le dialogue entre les différents acteurs : afin d’engager des changements profonds, seule une approche systémique entre filières et au sein des filières permettra de casser les silos et de considérer par exemple une rotation dans son ensemble afin de déployer des solutions adaptées localement.
Définir un modèle économique souhaitable pour la transition : que ce soit pour inciter les agriculteurs à modifier leurs modèles de production ou pour dépasser les difficultés de passage à l’échelle, il est nécessaire de réfléchir collectivement à un modèle économique attractif, robuste et viable pour l’ensemble du secteur concerné.
Articuler judicieusement la diversité des solutions existantes, en cartographiant l’ensemble des mécanismes de financements publics et privés disponibles au regard des besoins et des coûts identifiés. Il convient ensuite d’étudier les conditions d’éligibilité à ces différents financements.
Adapter les instruments financiers aux spécificités du secteur agricole : la transition vers des filières et pratiques durables, la diversification, le passage aux circuits courts, la transmission, l’installation, ou la reprise d’une exploitation sont autant de jalons qui génèrent des besoins spécifiques. Une compréhension fine de ces besoins est cruciale pour définir des solutions de financement adaptées au temps long de l’agriculture.
Plus largement, les enjeux du financement de la transition agricole conduisent à s’interroger sur la notion de « bien commun » compte tenu des défis environnementaux et sociaux que l’agriculture doit relever : santé publique, égalité d’accès, préservation de la biodiversité, maintien des paysages etc. Une agriculture durable a un coût mais il est indispensable de s’y engager pleinement. Reste à savoir dans quelle mesure il sera nécessaire de contraindre les acteurs à y participer et le rôle de l’Etat dans le soutien d’une agriculture et une alimentation de qualité.
1 Source : Décryptage des financements du système alimentaire français et de leur contribution aux enjeux de durabilité, I4CE, 2021
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