L’inflation au Canada, calculée en fonction de l’évolution de l’indice d’une année à l’autre, était plus faible que prévu en mai. L’inflation globale a diminué de 0,4 % le mois dernier après un recul de 0,2 % en avril. Encore une fois, ce chiffre négatif est principalement attribuable aux prix de l’énergie. Malgré le regain récent des prix du pétrole brut et à la pompe, les prix de l’énergie payés par les consommateurs demeuraient inférieurs de 30 % par rapport à il y a un an. Si l’on exclut l’énergie, l’inflation a connu une croissance modeste de 1 %, n’atteignant que la moitié de la cible de la Banque du Canada.
Ce ralentissement de l’inflation cadre avec la faible demande, qui occasionne une accumulation de la marge de capacités excédentaires. Ce phénomène est corroboré par le taux de chômage élevé et le faible taux d’utilisation des capacités. Les prix de l’énergie sont aussi frappés par ce fléchissement de la demande, en plus d’être plombés par l’offre excédentaire à l’échelle mondiale.
En ce qui a trait à la vente au détail, les prix des biens ont baissé de 2,3 % par rapport à il y a un an, tandis que les prix des biens semi-durables et non durables ont reculé de 3,9 % et 3,5 %, respectivement. Les prix des services ont augmenté de 1,3 % par rapport à mai 2019.
Les prix des vêtements et des chaussures ont diminué de 5,4 %, les prix du transport ont fléchi de 3,0 % et les prix des produits ménagers étaient inférieurs de 0,2 % par rapport à l’année précédente.
Les prix étaient plus élevés que l’an dernier dans certaines catégories, alors que les aliments (+3,1 %), les produits de santé et de soins personnels (+0,9 %) et le logement (1,0 %) coûtent plus cher. Fait à signaler, dans les deux derniers cas, les prix ont diminué en mai par rapport au mois précédent.
Excluant les aliments et l’énergie, la mesure de l’inflation fondamentale par Statistique Canada a reculé à 0,6 %. Les trois principales mesures de l’inflation fondamentale de la Banque du Canada étaient à la baisse, se situant entre 1,4 % et 1,9 % en mai.
Comme je l’ai souligné par le passé, un taux d’inflation globale négatif ne devrait pas être interprété comme un signe de déflation. Pour cela, il faudrait que l’IPC excluant l’énergie enregistre une baisse sur 12 mois, et que les prix d’un large éventail de produits diminuent. Nous observons plutôt un climat de faible inflation, marqué par de nombreuses modifications des prix relatifs des produits.
Les statistiques d’inflation sont plus faibles que prévu, mais ne devraient pas entraîner la modification de la politique monétaire par la Banque du Canada. Rappelons-nous que la banque centrale ne définit pas les politiques en fonction de l’inflation à l’heure actuelle, mais plutôt selon le taux d’inflation qui devrait prévaloir à son avis d’ici 12 à 18 mois. Avec la relance de l’économie, l’autorité monétaire s’attend sans doute à ce que l’inflation finisse par atteindre le taux cible de 2 % au cours de la deuxième moitié de l’année.
Après avoir affirmé pendant des semaines qu’il était trop difficile de présenter un énoncé économique dans l’actuel contexte d’incertitude économique, le premier ministre Trudeau a annoncé aujourd’hui que le gouvernement dresserait le « portrait » des finances fédérales le 8 juillet, en précisant que les projections ne seraient pas établies pour plusieurs années. Aussi, je m’attends à ce qu’on nous présente une estimation du déficit fédéral et du fardeau de la dette pour l’exercice 2020-2021.
Il s’agit d’un calcul difficile à faire compte tenu du degré élevé d’incertitude qui règne concernant le PIB et des programmes de soutien gouvernementaux qui ont été mis en place en 2020. L’ampleur de la contraction économique au second trimestre est toujours matière à débat et le rythme de la reprise pendant le déconfinement demeure très incertain. Selon moi, le gouvernement adoptera son approche habituelle : sonder les prévisionnistes du secteur privé, puis établir sa meilleure estimation à partir de la moyenne des réponses. Le gouvernement aura en main un coût estimatif de l’ensemble de ses récents programmes, sans toutefois disposer d’un chiffre exact. Par exemple, le recours à la subvention salariale par les employeurs a été largement inférieur aux attentes du gouvernement. La PCU a été prolongée, mais le gouvernement devra émettre une hypothèse quant au nombre de personnes qui renonceront à ce programme pour retourner au travail dans les mois à venir. Aussi, ce « portrait » reposera sur sa meilleure estimation.
J’imagine que le déficit sera supérieur à l’estimation de 252 G$ établie par le directeur parlementaire du budget cette année, et que le ratio de la dette au PIB sera plus élevé que la projection de 48 %, puisque le DPB a uniquement tenu compte des annonces effectuées par le gouvernement jusqu’au 24 avril. Cela dit, la faible utilisation de la subvention salariale pourrait compenser ces hausses. Même si le déficit et le fardeau de la dette s’avèrent plus élevés que les projections du DPB, le Canada jouit d’une situation financière suffisamment solide pour prendre en charge les mesures de soutien du gouvernement fédéral. En fait, sur le plan budgétaire, le Canada continuera de se comparer favorablement aux autres économies avancées. Mais qu’on se le tienne pour dit : la barre est plutôt basse.