De nombreux rapports économiques ont été publiés à l’étranger. L’économie de la zone euro a chuté de 14 % sur une base annualisée au cours des trois premiers mois de l’année. Les pays les plus touchés par la pandémie de COVID-19 sont, de façon générale, ceux dont l’économie a le plus souffert. Par exemple, l’économie de l’Espagne a reculé de 19 % et celle de l’Italie de 18 % au cours du premier trimestre de 2020. La France est une véritable anomalie dans ce contexte; malgré son expérience plus positive sur le plan de la santé, le PIB réel du pays a chuté de 21 %. Il s’agit de la contraction la plus importante dans l’ensemble de la zone euro. L’économie de l’Allemagne s’en est mieux tirée et n’a fléchi que de 8,6 % sur une base annualisée. Pour mettre les choses en contexte, Statistique Canada a signalé que l’économie a enregistré une baisse de 10 % au premier trimestre, non seulement en raison du confinement en mars, mais aussi à cause de facteurs transitoires, notamment l’installation de barricades sur des voies ferroviaires et les grèves d’enseignants. Les économies du Royaume-Uni et des États-Unis se sont mieux portées (recul de 7,7 % et de 4,8 % respectivement), mais cela s’explique en grande partie par l’arrêt plus tardif des activités économiques.
Même si les résultats du premier trimestre semblent incontestablement lamentables, nous prévoyons que ceux du deuxième trimestre seront pires. C’est d’ailleurs ce que confirment les données liées aux ventes de détail aux États-Unis en avril. Les ventes ont chuté de 16 % au cours du mois, une déception pour les analystes qui s’attendaient à un résultat d’environ -12 %. Compte tenu de cette diminution, combinée à celle de 8,3 % en mars, les ventes ont chuté d’un quart par rapport à la période précédant le confinement. Les résultats de la production industrielle ont également été publiés aujourd’hui. L’activité industrielle regroupée a baissé de 11 % en avril et la production du secteur manufacturier, de 14 %. Ces résultats annoncent un deuxième trimestre très faible au sud de la frontière.
L’économie canadienne connaîtra probablement en 2020 une contraction plus importante que l’économie américaine, mais notre évaluation actuelle donne à penser que la contraction annualisée du deuxième trimestre devrait avoisiner 40 %, soit moins que les 50 % que nous avions précédemment prédits. Ce changement est attribuable à la réouverture plus tôt que prévu de l’économie dans certaines parties du pays et à la résilience relative du marché du logement pendant le confinement.
Les mises en chantier au Canada sont demeurées relativement solides. Bien que le nombre de mises en chantier soit passé de 195 000 en mars à 166 000 en avril avec la mise en place du confinement, il n’en demeure pas moins que ce niveau de construction demeure décent. Les activités ont été soutenues par la possibilité de poursuivre la construction des habitations déjà en cours. Normalement, cela aurait exigé que les travaux aient déjà commencé, mais la définition a été élargie pour inclure les projets pour lesquels un permis avait été délivré. Le délai de deux à trois mois entre la délivrance du permis et le début de la construction a créé une période de transition et soutenu l’activité dans le secteur.
On ne peut pas dire la même chose du secteur des habitations existantes où les ventes ont chuté de plus de la moitié en avril et sont environ le tiers de ce qu’elles étaient avant la COVID. Le repli a été général, mais a été particulièrement marqué au centre du Canada. L’Ontario a également connu la diminution la plus importante des prix moyens, qui ont reculé de près de 14 % en avril, comparativement au recul national de près de 11 %. Toutefois, les personnes cherchant une aubaine seront déçues puisque le repli était presque entièrement lié à une part moins grande des habitations à prix élevé au cours du mois. L’indice des prix des logements, qui exclut l’effet de la composition sur les ventes, a diminué de 0,6 % en avril, et est 6,4 % plus élevé qu’il y a un an, ce qui est loin d’être une aubaine.
Cette performance est probablement attribuable, au moins en partie, à la hausse des taux d’intérêt. Bien que cela semble surprenant compte tenu de la baisse du rendement des obligations, les banques ont augmenté les taux d’intérêt hypothécaires au cours des dernières semaines afin de compenser les coûts engendrés par les reports de paiement des clients actuels. C’est d’ailleurs ce que confirme l’Enquête auprès des responsables du crédit publié aujourd’hui, et qui montre que les conditions d’octroi des prêts hypothécaires se sont resserrées considérablement tandis que les conditions d’octroi des prêts non hypothécaires se sont assouplies. Fait intéressant, même si les modalités non tarifaires des prêts se sont resserrées dans les deux catégories, seuls les prêts hypothécaires ont subi une hausse des taux d’intérêt.
Je tiens à souligner que la période de confinement ne donne pas nécessairement une indication de ce que sera la situation du secteur immobilier après le confinement. À la réouverture de l’économie, le taux de chômage sera plus élevé et le revenu des ménages généralement moins élevé. La croissance des salaires sera probablement faible également. Dans l’ensemble, je m’attends encore à une certaine correction sur le marché de l’immobilier résidentiel. Toutefois, les perspectives pour le marché de l’immobilier commercial sont encore plus pessimistes. Non seulement il y aura plus de locaux vacants en raison du ralentissement économique, mais il y aura aussi une baisse de la demande dans le secteur de l’immobilier commercial, étant donné que les entreprises continuent d’avoir recours au télétravail et que les consommateurs sont réticents à passer du temps dans les magasins.