Perspectives
Fiducies testamentaires, dons par des successions et fractionnement du revenu
Le 28 octobre 2014
Le plus récent budget fédéral canadien, déposé à la Chambre des communes le 11 février dernier, renfermait des propositions qui auront des répercussions sur la planification successorale des particuliers et sur les structures d’entreprise qui permettent le fractionnement du revenu avec les enfants mineurs. En août et en octobre, des propositions législatives visant à mettre en œuvre ces mesures fiscales ont été déposées.
Fiducies testamentaires
Les changements inclus dans le budget de 2014 ne devraient pas surprendre. L’an dernier, le gouvernement fédéral a sollicité des commentaires sur des propositions visant à éliminer les avantages fiscaux accordés aux fiducies testamentaires. La date limite de soumission des commentaires du public était décembre 2013. Le gouvernement a annoncé son intention d’intégrer les changements à son budget de 2014, éliminant ainsi le traitement fiscal préférentiel accordé depuis longtemps aux fiducies testamentaires.
Le revenu provenant d’une fiducie personnelle qui n’est pas payé, ou payable, aux bénéficiaires est imposé dans la fiducie. Les fiducies testamentaires (fiducies créées par testament ou par la succession d’une personne décédée) ont bénéficié de taux d’imposition plus faibles, car le revenu de la fiducie était imposé selon des taux progressifs, comme pour les particuliers. Toutefois, le revenu de fiducies entre vifs (soit des fiducies créées quand la personne est vivante) est assujetti au taux marginal d’imposition le plus élevé pour les particuliers (soit « l’imposition uniforme au taux maximum »). Cet écart de taux a permis aux familles, en particulier au conjoint de la personne décédée, de continuer de bénéficier des taux d’imposition progressifs de la personne décédée grâce à l’imposition d’un certain montant du revenu de la succession dans la fiducie (soit approximativement l’impôt qui aurait été exigible si la personne n’était pas décédée). Contrairement aux particuliers et aux fiducies entre vifs, les fiducies testamentaires ont été exemptées de l’obligation de verser des acomptes provisionnels trimestriels et par conséquent, elles ne paient l’impôt que dans les 90 jours suivant la fin de l’année d’imposition. De plus, la capacité d’une fiducie testamentaire de sélectionner une fin d’exercice différente de la fin de l’année civile pouvait créer une possibilité de report d’impôt.
À compter de 2016, les fiducies testamentaires ne bénéficieront plus de taux d’imposition progressifs. Le revenu de ces fiducies sera assujetti à l’imposition uniforme au taux maximum. Par contre, les successions qui ont au plus 36 mois d’existence (définies dans les propositions comme une « succession assujettie à l’imposition à taux progressifs ») demeurent assujetties à l’impôt aux taux progressifs. Si la succession est maintenue au-delà de 36 mois d’existence, elle sera considérée comme ayant une fin d’exercice réputée 36 mois après la date du décès et sera assujettie, à compter de cette date, à l’imposition uniforme au taux maximum.
Les fiducies testamentaires dont les bénéficiaires sont admissibles au crédit d’impôt pour personnes handicapées continueront d’être imposées aux taux progressifs par suite de l’introduction d’une « fiducie admissible pour personne handicapée ». En vertu de ces règles, le bénéficiaire qui est admissible au crédit d’impôt pour personne handicapée et la fiducie testamentaire choisiront conjointement dans la déclaration de revenus T3 que la fiducie soit une fiducie admissible pour personne handicapée pour l’année de la fiducie. Les propositions prévoient aussi le recouvrement d’économies d’impôt dans les cas où le revenu imposable de la fiducie admissible pour personne handicapée d’une année antérieure n’est pas distribué à une personne qui était un « bénéficiaire optant » de la fiducie dans une année antérieure.
Le 31 décembre 2015, les fiducies testamentaires (autres que les successions assujetties à l’imposition à taux progressifs) dont la fin d’année d’imposition ne correspond pas à la fin de l’année civile auront une fin d’année réputée. Les fiducies testamentaires (autre que les successions assujetties à l’imposition à taux progressifs) seront tenues de verser des acomptes à compter de 2016.
Dons de succession
Les modifications proposées contiennent des changements attendus qui simplifient la déductibilité des dons de bienfaisance au décès. Le geste pourtant simple de faire un don caritatif dans le cadre d’une planification successorale était excessivement complexe, car la possibilité de réclamer le crédit d’impôt pour don de bienfaisance reposait sur l’interprétation et les politiques administratives de l’Agence du revenu du Canada (ARC) concernant la formulation du don dans le testament. La formulation du don dans le testament déterminait si le don donnait droit à un crédit d’impôt pour don de bienfaisance pour le particulier dans l’année du décès (ou l’année précédente) ou à un crédit d’impôt pour la succession.
Il est proposé d’éliminer cette complexité et la nécessité de s’appuyer sur les interprétations de l’ARC. Dans le cas de décès survenus après 2015, les dons faits conformément au testament d’une personne et ceux faits par la succession du particulier (une succession assujettie à l’imposition à taux progressifs ou non) seront réputés avoir été faits uniquement par la succession au moment où les biens faisant l’objet du don sont effectivement donnés à l’organisme de bienfaisance. En conséquence des modifications proposées, le liquidateur de la succession d’un particulier assujettie à l’imposition à taux progressifs aura la possibilité d’affecter les dons versés dans les 36 premiers mois du décès soit aux deux dernières années d’imposition du particulier, à l’année d’imposition de la succession au cours de laquelle le don a été versé ou à une année d’imposition antérieure de la succession. Les successions autres que les successions assujetties à l’imposition à taux progressifs pourront réclamer des dons dans l’année où ils ont été faits ou dans n’importe laquelle des cinq années suivantes.
Aux termes des modifications proposées, la position administrative de l’ARC selon laquelle un particulier peut réclamer les dons de bienfaisance faits par son conjoint ou son conjoint de fait serait normalisée.
Élargissement des règles relatives à l’impôt sur le revenu fractionné avec des enfants mineurs
Au cours des dernières années, le gouvernement a continué de revoir les règles relatives à l’impôt sur le revenu fractionné avec des enfants mineurs et a étendu leur application à d’autres types de revenu. Les règles concernant l’impôt sur le revenu fractionné avec des enfants mineurs ont pour but de réduire tout type de fractionnement de revenu avec des enfants mineurs. Le changement proposé dans le budget de 2014 à cet égard pourrait aussi avoir des répercussions sur certaines structures d’entreprise. L’élargissement des règles a pour effet d’appliquer l’imposition uniforme au taux maximum au revenu qui est versé, directement ou non, à un enfant mineur en provenance d’une fiducie ou d’une société de personnes, si le revenu provient d’une entreprise ou de la location de biens et si une personne liée à l’enfant mineur participe activement et régulièrement aux activités de la fiducie ou de la société de personnes pour tirer un revenu provenant d’une entreprise ou de la location de biens. Par exemple, un parent peut fournir des services professionnels aux clients externes d’une société de personnes dans laquelle l’enfant mineur de la personne concernée est associé. La participation de l’enfant dans la société de personnes pourrait être détenue directement ou par voie d’une fiducie dont l’enfant est bénéficiaire. Ces règles s’appliquent à compter de l’année d’imposition 2014.
Mesures à prendre
Les fiduciaires de fiducies testamentaires et les liquidateurs de succession doivent veiller à se conformer aux nouvelles mesures. Les bénéficiaires de fiducies testamentaires devraient réfléchir aux répercussions de ces mesures sur leur situation personnelle. Plus particulièrement, il faut se demander si les fiducies devraient continuer de faire partie de leur planification fiscale. Une planification soignée doit être entreprise conjointement avec la dissolution d’une fiducie pour faire en sorte qu’il n’y ait aucune incidence fiscale défavorable. Même si les règles proposées n’éliminent pas le transfert d’actifs en franchise d’impôt à une fiducie testamentaire au profit du conjoint, les testaments existants devraient être examinés pour déterminer s’il y a lieu de créer une fiducie de conjoint au décès.
En raison des changements aux règles relatives aux dons faits par testament ou par une succession, les contribuables devraient passer leur testament en revue pour garantir que le résultat de leur planification sera conforme aux nouvelles règles fiscales.
Les structures d’entreprise qui entraînent la distribution de revenu d’entreprise ou de location de biens à des enfants mineurs à titre d’associés ou de bénéficiaires de fiducie devraient être examinées pour déterminer les implications de l’élargissement des règles relatives à l’impôt sur le revenu fractionné avec des enfants mineurs.
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