Communiqué de presse
Fort potentiel des travailleurs seniors pour combler la pénurie de main d’œuvre – 1/3 des entreprises suisses les considèrent cependant comme un désavantage concurrentiel
Zurich/Genève, 11 décembre 2018
- La pénurie de main d'œuvre va s'accentuer en Suisse dans les années à venir. Les plus de 50 ans, les femmes et les travailleurs à temps partiel recèlent un énorme potentiel inexploité qui permettrait de surmonter cette lacune.
- De nombreuses sociétés suisses ne considèrent pas les travailleurs plus âgés comme une ressource: un tiers d'entre elles les considèrent comme un désavantage concurrentiel.
- Même si les préjugés envers les travailleurs plus âgés continuent de prévaloir, une nouvelle enquête Deloitte montre qu'ils sont hautement qualifiés, motivés, flexibles, et moins préoccupés par la rémunération et la sécurité de l'emploi.
- Près d'un quart des plus de 50 ans souhaitent continuer de travailler au-delà de l'âge de la retraite. 85% déclarent être motivés au travail, soit bien plus que les autres tranches d'âge.
- Ces informations et plus encore sont disponibles dans la nouvelle enquête de Deloitte qui évalue les attitudes de la main d'œuvre, réalisée auprès de 15’000 personnes dans toute l'Europe, dont 1’000 participants en Suisse.
Taux de chômage faible, salaires élevés et main d'œuvre qualifiée: c'est un fait connu, le marché du travail suisse se porte bien. Cependant, d'importants défis se profilent à l'horizon. La numérisation force de plus en plus les employés à développer des compétences nouvelles et différentes. La demande d’employés hautement qualifiés dans les domaines de la créativité, de l'intelligence sociale et de la technologie numérique augmente. Certains secteurs, dont les TIC et la santé, ont déjà des difficultés à trouver du personnel. De plus, le changement démographique lié au vieillissement amplifie la pénurie émergente en main d'œuvre.
«2016 a été la première année où le nombre de travailleurs suisses quittant le marché du travail a dépassé le nombre de travailleurs qui l'ont intégré. Si cela continue, nous serons face à une pénurie d'environ un demi-million de travailleurs d'ici 2030. Les entreprises doivent commencer à repenser non seulement la façon dont elles recrutent le personnel compétent, mais devront aussi recruter un nombre de personnes suffisant pour répondre aux besoins futurs. Une stratégie clé consiste à mieux utiliser des réserves existantes mais sous-exploitées, telles que les femmes et les employés plus âgés, ainsi que les travailleurs à temps partiel», déclare Myriam Denk, Responsable Future of Work chez Deloitte Suisse.
Les réserves de main d’ouvre inexploitée pourraient combler les lacunes du marché du travail
Différentes solutions pour remédier à l’imminente pénurie de main d'œuvre ont fait l'objet de débats. Allonger la durée du travail ou relever l'âge de la retraite sont dans une impasse politique, tout comme faire venir de la main d'œuvre qualifiée de l'étranger en assouplissant les politiques d'immigration. L'automatisation accrue va entraîner un changement structurel du marché du travail, mais il est peu probable que celle-ci compensera pleinement l'impact du changement démographique.
Comment faire alors pour combler les futurs manques de main d'œuvre? «Nous voyons un énorme potentiel dans les réserves de main d'œuvre existantes mais inexploitées. ‘L’armée de réserve de main d'œuvre’ et ceux qui travaillent à temps partiel mais pourraient augmenter leur charge de travail recèlent le plus grand potentiel. Les femmes et les travailleurs âgés de plus de 55 ans sont particulièrement nombreux dans ces groupes», explique Michael Grampp, Économiste en chef chez Deloitte Suisse et auteur de la nouvelle enquête qui évalue les attitudes de la main d'œuvre. «Bon nombre de ces personnes sont déjà à la retraite et touchent leur pension. Elles ne sont donc pas en recherche active d'emploi, mais envisagent pourtant le travail comme une possibilité. Pour garder un taux d’employabilité élevé pour les travailleurs âgés, il est essentiel qu’ils soient flexibles par rapport aux attentes salariales et les heures de travail.»
Les entreprises doivent repenser la valeur des travailleurs plus âgés
Selon l'enquête de Deloitte, 27% des plus de 50 ans en Suisse souhaitent continuer de travailler au-delà de l'âge de la retraite. Ce groupe inclut une proportion de travailleurs hautement qualifiés plus importante que la moyenne. En outre, 85% des participants de 55 ans et plus déclarent être motivés au travail, 89% ont du plaisir à travailler, et 81% pensent que leur travail est apprécié, soit des chiffres considérablement plus élevés comparés aux autres tranches d'âge.
«Pas assez qualifiés, motivation faible, manque de flexibilité: de nombreux employeurs ont des préjudices infondés contre les travailleurs plus âgés. Il faut que les entreprises repensent leur attitude envers cette catégorie de travailleurs. Celles qui continuent de la considérer comme un désavantage et qui se concentrent uniquement sur le recrutement de la main d’œuvre plus jeune, commettent une erreur stratégique », souligne Myriam Denk.
À l'heure actuelle, de nombreuses sociétés suisses estiment que les travailleurs plus âgés ne sont pas une ressource pertinente. Un tiers des entreprises suisses les considèrent comme un désavantage concurrentiel, selon l'enquête Deloitte Human Capital Trends 2018. Ce chiffre dépasse de loin la moyenne internationale de 20%. De plus, selon l'enquête de Deloitte CFO Survey H2 2018, 20% seulement des entreprises suisses recourent actuellement aux réserves alternatives de main d'œuvre, incluant les travailleurs plus âgés, pour combler leurs lacunes en compétences.
Des modèles de carrière plus flexibles sont nécessaires
Sur les 27% de participants de plus 50 ans en Suisse qui déclaraient souhaiter continuer de travailler au-delà de l'âge de la retraite, 51% voudraient maintenir leurs conditions de travail actuelles, tandis que 35% souhaitent continuer de travailler mais en restant moins d'heures. S'ils avaient le choix, 27% des plus de 55 ans travailleraient à mi-temps, 15% seraient freelance, 10% seraient indépendants et 18% opteraient pour une carrière ‘portefeuille’. Il semble donc impératif que les entreprises rectifient leurs modèles d'emploi traditionnels pour les rendre plus attrayants auprès de nouveaux groupes de travailleurs.
«Les entreprises doivent proposer davantage de modèles de carrière qui permettent aux employés de travailler plus longtemps, mais aussi avec plus de flexibilité. Elles doivent également adapter leur stratégie de RH à des vies professionnelles plus longues et réduire les préjugés inconscients lors des processus de recrutement», conclut Myriam Denk. Les modèles de carrière alternatifs pour la main d'œuvre âgée de 55 ans et plus incluent les ’carrières de révérence’, c’est-à-dire des trajectoires où la charge de travail, les responsabilités et la rémunération sont réduits progressivement, le travail partagé avec des collègues plus jeunes pour assurer le transfert de connaissances, ou les rôles de coaching et de mentorat. Les entreprises pourraient aussi créer des pôles d'employés retraités intéressés auxquels elles pourraient faire appel pour profiter de leur expertise lorsque nécessaire.