Points de vue
L’avenir des soins de santé
Deloitte Life Sciences & Health Care Predictions 2025
Axées sur les données, orientées sur la prévoyance, centrée sur le patient: les nouvelles prévisions sectorielles de Deloitte montrent la direction que prennent les soins de santé.
De la télémédecine à l’intelligence artificielle en passant par les collaborations innovantes, le secteur des soins de santé connaît un bouleversement technologique et organisationnel qui profitera à toutes les parties concernées, qu’il s’agisse des patients ou des prestataires de soins. C’est ce que révèle la nouvelle étude de Deloitte «Life Sciences & Health Care Predictions 2025». La numérisation du secteur des soins de santé a été fortement accélérée par la pandémie actuelle de COVID-19, mais elle avait déjà pris un élan considérable auparavant.
Les crises sont des catalyseurs du changement. La pandémie de COVID 19 l’a une fois de plus prouvé. Cela vaut pour la numérisation en général, qui s’en trouve stimulée, mais surtout pour le secteur de la santé. D’une part, la lutte contre la pandémie elle-même exige des méthodes médicales innovantes; d’autre part, les confinements et les restrictions de contact dans le secteur des soins de santé ont également nécessité un recours accru à des approches telles que la télémédecine. Les experts de Deloitte ont comparé ces développements avec les principales tendances du secteur et en ont tiré dix prévisions révolutionnaires pour l’année 2025 dans le document Life Sciences & Health Care Predictions 2025.
Les conclusions de ce rapport sont également très pertinentes pour la Suisse, notamment en ce qui concerne cinq domaines sélectionnés, qui seront présentés plus en détail ci-dessous – chacun étant complété par de premiers exemples actuels dans lesquels les nouveaux paradigmes deviennent déjà apparents.
Des diagnostics innovants, de nouvelles formes de thérapie - Selon l’étude, le moteur central du changement dans les soins de santé est visible dans les nouvelles dimensions de l’acquisition et du traitement des données. L’étape vers une «médecine 4P» (prédictive, préventive, personnalisée, participative) sera rendue possible d’ici 2025 par une multitude d’innovations numériques. Les thérapies numériques, l’évaluation par l’IA des données de diagnostics avec les outils d’aide à la décision correspondants ou le suivi innovant des patients (Remote Patient Monitoring, RPM) n’en sont que quelques exemples.
À l’avenir, les données interopérables des différents points de traitement et appareils pourront être rassemblées de manière de plus en plus structurée grâce aux nouvelles technologies, du séjour à l’hôpital au fitness tracker. La grande quantité de données de haute qualité permettra d’obtenir des informations totalement nouvelles. D’autre part, les données individuelles permettront également d’adopter des approches thérapeutiques hautement personnalisées et d’assurer la transparence pour chaque patient.
Il y a en outre des avancées dans des domaines tels que les nanotechnologies, l’épigénétique, l’impression de tissus en 3D et l’informatique quantique qui soutiennent ce développement. En plus d’améliorer considérablement les soins, de nombreuses technologies ont également le potentiel de réduire considérablement les coûts traditionnels, à la fois par des gains d’efficacité directs dans les soins et par des économies indirectes résultant d’une meilleure santé globale. Pour en savoir plus, vous pouvez consulter le rapport de Deloitte «Breaking the Curve».
Exemples actuels
- Dans la communauté en ligne de patients PatientsLikeMe, qui fait maintenant partie de United Health, plus de 800 000 membres enregistrent leurs expériences personnelles en matière de santé. Grâce à une évaluation intelligente des données, ils peuvent apprendre comment les autres personnes concernées gèrent la même situation. Avec l’avatar numérique DigitalMe, il est par exemple possible «d’essayer» virtuellement de nouveaux médicaments pour déterminer les soins les plus efficaces.
- Le dossier médical local des patients du Luks avec ses sites de Lucerne, Sursee et Wolhusen est stockée sur le portail «My Luks». Grâce à des fonctions supplémentaires, le patient peut participer activement au traitement.
- Le PORTAIL DE SANTÉ iMedOne® implique les patients dans le processus de soins. Un lien direct entre iMedOne® et le patient par le biais d’une application, d’un portail web ou d’une solution kiosque dans l’hôpital facilite les processus administratifs et assure un gain de temps, augmente le respect des rendez-vous et permet une interaction entre la clinique et le patient sans mobiliser le personnel en même temps. Cette solution offre un large éventail d’applications pour les processus cliniques et la vie quotidienne.
- L’application heyPatient aide les patients et leurs proches à suivre leurs rendez-vous médicaux. Les documents importants, y compris les cartes d’assurance, sont à portée de main à tout moment. «heyFamily» assure le partage mutuel des rendez-vous. Grâce à l’application, vous pouvez vous inscrire numériquement auprès des partenaires de santé de heyPatient et recevoir vos rendez-vous directement sur votre timeline, intégrée à votre calendrier mobile.
Jusqu’à présent, les patients devaient s’adapter aux structures du système de soins de santé, par exemple, en termes de disponibilité locale des services. Cela changera à l’avenir: en 2025, les soins de santé seront orientés dans l’autre sens, vers les patients, leur localisation et leurs contraintes de temps. Selon le cas, le personnel de santé collectera en permanence des données de santé au moyen de capteurs grâce au RPM (Remote Patient Monitoring) et fournira aux patients des thérapies hyper-personnalisées pour des indications spécifiques.
La télémédecine (qu’elle soit ambulatoire ou hospitalière) est un facteur décisif pour l’évolution vers ce pronostic, qui a déjà été fortement accéléré par la crise du COVID. Compte tenu de la pandémie, l’intérêt et la volonté de la population de participer au RPM ou de fournir ses propres données, par exemple, ont augmenté. L’amélioration des réseaux 5G et de nouvelles approches telles que les jumeaux numériques ont également soutenu ce changement.
Exemples actuels
- Au Royaume-Uni, le Bradford Teaching Hospitals NHS Foundation Trust (BTH) a ouvert un centre de contrôle numérique en 2019. Les activités de l’hôpital y sont surveillées en temps réel et un «Wall of Analytics» traite les données provenant de sources telles que les dossiers médicaux ou les capteurs des patients. Les informations qui en résultent améliorent les décisions cliniques, opérationnelles et financières.
- Le Sheba Medical Center israélien a créé le hub d’innovation ARC (accelerate, redesign, collaborate) en 2019. Cet incubateur coopère avec des start-ups et met en commun des données de santé qui sont traitées dans des formats de réalité virtuelle. - Les chercheurs ont mis au point un réseau neuronal pour analyser les données relatives au diabète. Ces données seront recueillies via un smartphone à l’aide d’une nouvelle méthode de biomarqueurs.
- La surveillance à distance des fonctions vitales pourrait éviter aux patients atteints de coronavirus des visites à l’hôpital et soulager les cliniques. L’hôpital universitaire Luigi Sacco de Milan en fait l’expérience. Une start-up suisse mène le projet avec le système initialement développé pour les voyages dans l’espace. Dans la dernière version développée par le Centre suisse d’électronique et de microtechnique (CSEM) de Neuchâtel pour l’Esa, les données mesurées sont transmises en temps réel par Bluetooth à un système central via une application mobile installée sur le smartphone du patient, à laquelle le personnel soignant peut également accéder.
En 2025, les fabricants de dispositifs médicaux installent de plus en plus de capteurs intelligents, mettent leurs produits en réseau dans l’Internet of Medical Things (IoMT) et se transforment de producteurs de matériel en producteurs de logiciels. Des dispositifs innovants permettent d’améliorer la qualité des soins grâce à des fonctionnalités telles que les connexions sans fil au dossier médical électronique, la transmission et la surveillance en temps réel des signes vitaux avec une précision accrue des mesures et un soutien des flux de travail. L’analyse des données, les méthodes cognitives et la robotique peuvent ainsi avoir leur plein impact.
Les approches basées sur les données permettent des thérapies personnalisées et une prévention plus ciblée, et les collaborations avec les entreprises technologiques aident à introduire de nouvelles stratégies d’engagement des clients, par exemple. De même, les dispositifs médicaux génèrent désormais des ensembles de données qui peuvent être utilisés comme RealWord Evidence (RWE) pour de nouveaux développements. En outre, la nouvelle base de données crée également des possibilités complètement différentes pour le contrôle et la rémunération des services de santé dans le sens des modèles de soins de santé basés sur la valeur (VBHC) ainsi que des approches de santé de la population et crée ainsi la base de nouveaux modèles commerciaux. Avec le VBHC, on passe d’un modèle axé sur les procédures à une approche budgétaire holistique, axée sur les résultats. La définition et la vérification de critères de résultats significatifs ont souvent constitué un obstacle pratique à cet égard; c’est précisément là que les nouveaux dispositifs en réseau et leurs mesures sont utiles: la mesurabilité d’un nombre croissant de «Patient outcomes» permet une évaluation plus précise. L’essentiel est que cette approche améliore à la fois les résultats et la structure des coûts.
Exemples actuels
- La société américaine Bruin Biometrics a mis au point un scanner portable pour les escarres. Les données saisies par cette technologie ont été utilisées en partie comme base pour concevoir des accords de rémunération avec les prestataires britanniques.
- Deloitte a réalisé une simulation de crowdsourcing avec des partenaires medtech. Elle a constaté une tendance de nombreuses entreprises à délaisser le matériel informatique traditionnel au profit des logiciels et des services numériques. On prévoit également une pression concurrentielle accrue de la part des grands groupes technologiques orientés vers le consommateur.
- La plateforme Minddistrict, un projet d’Asklepios Kliniken, offre aux utilisateurs des applications avancées de santé mentale en ligne. Des experts ont élaboré des modules scientifiquement fondés grâce auxquels les patients peuvent améliorer leur bien-être par eux-mêmes.
- L’Hôpital universitaire de Bâle se penche activement sur le thème du Value Based Healthcare (VBHC). Dans le cadre d’un projet pilote mené en collaboration avec le Groupe Mutuel et l’Hôpital de La Tour, de nouveaux modèles tarifaires sont mis au point pour deux types de traitement: la prothèse de hanche et le traitement du cancer de la prostate localisé et non métastatique.
En 2025, les approches numériques avancées ont considérablement amélioré la transparence et l’efficacité des chaînes d’approvisionnement médicales. Désormais, elles ne suivent plus l’ancien processus linéaire, mais une logique de bout en bout, dynamique et flexible, fondée sur les données. À la base de ce Digital Supply Network (DNS) se trouvent des technologies clés telles que l’Internet des objets (IoT), la blockchain et l’IA, qui permettent notamment le traitement des données et la prise de décision en temps réel. Les systèmes d’analyse avancés permettent de réduire les coûts grâce à la prévision de la demande, à la gestion intelligente des entrepôts, à l’optimisation de la logistique et de l’approvisionnement, et à une meilleure planification des effectifs. Les entreprises biopharmaceutiques profitent également de ces tendances et parviennent à une gestion beaucoup plus efficace de la conformité réglementaire.
Exemples actuels
- La société allemande Merck KGaA, spécialisée dans les sciences de la vie, a mis sur pied un projet de prévision automatisée de la demande. Grâce à l’apprentissage automatique (Machine learning, ML), l’efficacité de la chaîne d’approvisionnement est améliorée, ce qui se traduit par une optimisation démontrable pour 75% des produits enregistrables.
- La startup américaine RxAll a développé une plateforme basée sur l’IA pour détecter les médicaments contrefaits. Un spectromètre est utilisé pour vérifier les signatures des substances actives dans un test non destructif et les comparer à une base de données. Avec le tout dernier appareil, le processus prend 20 secondes et a une précision de 99,9%.
Les nouvelles collaborations se sont révélées être une stratégie riche en cibles pour accélérer les progrès dans le domaine des soins de santé en 2025. Les formes d’organisation telles que les centres d’excellence (CoE) ou les réseaux de recherche rassemblent des acteurs de différents domaines de la société et secteurs économiques. Ces partenariats transcendent les frontières antérieures des institutions publiques et privées telles que les universités, les établissements de soins de santé et les entreprises.
Ces collaborations sont budgétisées avec de nouveaux modèles de financement et soutenues par les gouvernements ou les régulateurs. La transformation numérique, les plateformes ouvertes et les normes nouvellement établies pour l’échange de données favorisent le développement et la diffusion des nouvelles technologies et améliorent la qualité des soins de santé pour tous les citoyens.
Exemples actuels
- Le consortium CARE (The Corona Accelerated R&D in Europe) coordonne le développement du traitement pour COVID-19 à travers l’Europe. Ce partenariat intersectoriel de 37 institutions et entreprises universitaires et scientifiques dispose d’un budget de 77 millions d’euros financé par l’UE.
- En Suisse, un groupe d’acteurs de la santé forme un consortium national sous le nom de GESUNDTEC. L’objectif est de concevoir, de construire et d’exploiter une plateforme nationale sous la forme d’une place de marché pour les solutions de soins de santé basées sur le cloud, y compris les services associés. Certains hôpitaux et prestataires de services ont commencé ou envisagent au moins de créer des clusters de partenariat et des collaborations dans l’environnement informatique.
- Le groupe Vodafone opère un campus 5G en coopération avec l’hôpital universitaire de Düsseldorf. Des technologies telles que la 5G, le Mobile Private Network (MPN) et le Multiaccess Edge Computing (MEC) permettent des applications telles que la télémédecine ou les consultations virtuelles d’experts avec visualisations 3D.
Perspective: obstacles, solutions, compétences
La crise actuelle du COVID-19 a considérablement accéléré les tendances à la transformation des soins de santé. Mais cela ne suffira pas pour que les réalisations décrites deviennent la norme d’ici 2025. De l’avis des experts de Deloitte, des efforts ciblés sont donc nécessaires dans quatre domaines clés au cours des prochaines années:
- Travailleurs qualifiés: pour les nouvelles technologies à l’origine d’un grand nombre des innovations annoncées, la formation des employés est le facteur clé de la réussite. Le leadership permet l’élargissement des compétences grâce à un état d’esprit tourné vers le numérique et à une gestion ciblée du changement. En 2025, les compétences numériques des employés sont bien avancées, l’inclusion numérique garantit un accès plus large.
- Nouvelles formes de financement et nouveaux modèles économiques: les approches de santé publique représenteront une part croissante des dépenses de santé. Cela nécessitera des efforts particuliers en matière de financement. Un facteur positif à cet égard est que le coût des capteurs et des tests diminuera considérablement d’ici 2025. Les nouveaux écosystèmes créent de nouvelles incitations économiques, ce qui favorise l’innovation axée sur les données de la part des entreprises et apporte des offres performantes sur le marché. Les nouveaux modèles de financement, par exemple dans le sens des soins de santé basés sur la valeur, ouvrent également des solutions prometteuses pour des investissements tournés vers l’avenir. Des améliorations de l’efficacité sont réalisées tout au long de la chaîne de valeur.
- Le nouveau paradigme réglementaire: la réglementation pose des défis à la transformation. À l’avenir, cependant, l’approche deviendra plus flexible, la coopération avec les régulateurs conduira à un meilleur équilibre entre la prévention des risques et l’innovation. Les régulateurs travaillent plus efficacement et parviennent de plus en plus à une convergence internationale. Cela permet aux entreprises d’optimiser leurs objectifs commerciaux et conduit à de meilleurs résultats pour les patients.
- Nouvelles solutions de données: protection des données, cybersécurité et interopérabilité - des progrès supplémentaires doivent être réalisés dans ces domaines d’ici 2025. La data science et les technologies du cloud peuvent y contribuer. Les données des utilisateurs peuvent désormais être collectées, partagées et analysées selon des normes internationales. Dans ce processus, la conformité avec les réglementations en matière de protection des données est assurée de manière proactive. Les employés sont également formés aux implications éthiques des solutions d’IA.
Les sujets susmentionnés mettent en évidence les domaines sur lesquels le secteur devrait particulièrement se concentrer en pensant à l’avenir de l’industrie des soins de santé. L’incitation à le faire est évidente: les prévisions de Deloitte en matière de LSHC pour 2025 dressent en effet un tableau globalement positif, car les nouveaux paradigmes profitent à toutes les parties prenantes de l’écosystème des soins de santé - des patients aux exploitants de cliniques. Téléchargez ici les Deloitte Life Sciences & Health Care Predictions 2025 et lisez toutes les conclusions de l’étude dans le document original.
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