fournisseurs-equipements-protection-individuels

Actualité

Sélectionner des fournisseurs d’équipements de protection individuels (EPI) pendant la pandémie

Le difficile équilibre entre l’urgence et la gestion de risques

Sélectionner et contrôler les fournisseurs d’EPI pendant la pandémie de coronavirus — gérer les risques liés aux situations urgentes

A l’aune du déconfinement, l’ensemble des acteurs publics et privés doivent s’approvisionner en équipements de protection individuelle afin de protéger leurs salariés et leurs clients. Les dirigeants et services achats des entreprises sont sollicités pour sélectionner, rapidement, les fournisseurs d’EPI. L’urgence et l’enjeu les rendent vulnérables : ils peuvent subir des pressions pour alléger et écourter les contrôles habituellement réalisés sur les nouveaux fournisseurs et sélectionner des fournisseurs frauduleux ou inexpérimentés.

Certains contrôles, même allégés, peuvent éclairer les acheteurs et les aider à sélectionner les fournisseurs d’EPI. Voici quelques pistes de réflexion dans ce processus.

Il faut, au préalable, définir quel type de protection est nécessaire pour votre entreprise. Par exemple, il existe des masques sanitaires destinés aux professionnels de santé (type masques chirurgicaux encadrés par l’Agence Nationale de Sécurité du Médicament et des produits de Santé ou des masques de protection respiratoire type FFP2), ou des masques non sanitaires (pour les professionnels en contact avec le public, de catégorie 1 ou des masques de protection de catégorie 2). 

Les masques sanitaires sont des dispositifs médicaux et font l’objet d’une règlementation et d’une supervision stricte de l’ANSM ou du Ministère du Travail. Ils ne sont fabriqués que par certains fournisseurs. Les masques non sanitaires ne sont pas des dispositifs médicaux et ne font pas l’objet du suivi réglementaire opéré par l’ANSM ou le Ministère du Travail. 

Comment identifier les fournisseurs de masques ou de protections ? 

En France, ces dernières semaines, de nombreux acteurs publics et privés se sont mobilisés pour :

  • déterminer les caractéristiques techniques que les masques doivent respecter ;
  • recenser les fabricants susceptibles de fournir des masques ;
  • tester ces fabricants : la Direction Générale des Armements a publié le 7 mai 2020 les résultats de ses tests1 ;
  • mettre en place des plateformes permettant aux entreprises de passer commande ou mettre en relation des fournisseurs, telles que https://stopcovid19.fr/, https://masques-pme.laposte.fr ou https://savoirfaireensemble.fr/, partenaires du Ministère de l’Economie et des Finances.

Si le fournisseur est recensé par ces plateformes, quels contrôles réaliser? 

Ces plateformes effectuent une première sélection, technique ou administrative, et permettent d’identifier les fournisseurs potentiels plus rapidement. Elles apportent davantage de transparence et de visibilité. Cependant, elles ne se substituent pas à une analyse détaillée, réalisée par chaque entreprise pour réduire leurs risques sanitaires, opérationnels et juridiques. 

Quels contrôles supplémentaires réaliser sur un fournisseur potentiel d’EPI ?

Les acheteurs peuvent aussi :

  • Consulter la base de données de l’ANSM comprenant les mesures administratives prises à l‘encontre des fournisseursen cas de non-respect des lois et des règlements ;
  • Confirmer l’enregistrement de la société, rechercher les informations légales disponibles, identifier les dirigeants et actionnaires de l’entité et effectuer des recherches pour comprendre l’histoire de l’entreprise et de ses dirigeants ; 
  • Examiner les informations sur l’entreprise disponibles en ligne, y compris sur le site internet du fournisseur ;
  • Rechercher les éventuelles condamnations ou sanctions à l’encontre de l’entité ou ses dirigeants et actionnaires ;
  • Effectuer des recherches ciblées dans les médias et sur le web pour identifier les éléments défavorables ou pertinents sur l’entité et ses dirigeants et actionnaires ;
  • Rechercher les éventuels litiges impliquant l’entité et ses dirigeants ;
  • Déterminer si l’entité fait l’objet d’une procédure collective ou si ses dirigeants et actionnaires sont aujourd’hui impliqués (ou l’ont été) dans une procédure collective.

Quels sont les risques si ces contrôles ne sont pas réalisés ? 

Selon les circonstances, si les entreprises ne réalisent pas toutes ou parties de ces vérifications sur les fournisseurs, elles s’exposent à des risques à courte échéance, ou à plus long terme, tels que :
 

Fournisseurs frauduleux ou fictifs 
La ruée vers les EPI a créé un effet d’aubaine pour les produits contrefaits ou falsifiés et les fournisseurs peu scrupuleux ou inexpérimentés. Par exemple, certains fournisseurs concluent des marchés pour des produits qu’ils n’ont pas en stock. Prestige Ameritech, le plus grand fabricant de masques médicaux aux États-Unis, a donné l’alerte dès la fin du mois de Mars, et indiqué que de nombreux individus se faisaient passer pour des salariés de l’entreprise, ou créaient des sites internet falsifiés. Dans l’urgence, et pour remplir à leur obligation de sécurité envers leurs salariés, les entreprises sont davantage exposées aux risques et aux fraudeurs.
 

Fournisseurs inexpérimentés
Les jeunes entreprises ou celles qui ne fabriquaient pas d’EPI auparavant peuvent - intentionnellement ou non - surestimer leur capacité de production. Elles peuvent aussi sous-estimer les défis à relever afin de répondre à une demande urgente et sans précédent. Le manque d’expérience représente un risque fort que les acheteurs potentiels doivent prendre en compte, alors que la qualité des EPI et la rapidité d’exécution des commandes sont essentielles. 
 

Atteinte à la réputation de l’entreprise
Les salariés, comme le public, observent avec attention les entreprises et leur capacité à protéger leurs salariés, leurs clients et leurs fournisseurs. Une mauvaise gestion du risque sanitaire pourrait nuire à la réputation et à l’image de marque, en particulier si le fournisseur ne livre pas en temps voulu les EPI de qualité, indispensables à la sécurité .
 

Responsabilité juridique
Certains avocats indiquent que les poursuites judiciaires vont être plus nombreuses dans les prochains mois. Les entreprises risquent d’être accusées de ne pas avoir pris les mesures de précautions et de protections nécessaires à l’égard de leurs employés, leurs clients, leurs fournisseurs voire de l’ensemble de leurs tiers. En allégeant ou en supprimant les contrôles sur les fournisseurs d’EPI, les entreprises s’exposent davantage à des poursuites.
 

Lois et réglementations
Les entreprises qui se tournent vers des fournisseurs étrangers parfois pour la première fois, doivent prendre en compte les risques de non conformité en matière de lutte contre la corruption par exemple (encadré par la loi Sapin II en France, ou le Foreign Corrupt Practices Act aux Etats-Unis). L’entreprise s’expose à des risques si, par exemple, le fournisseur est une entreprise publique étrangère, ou s’il est détenu par un état étranger. 

Sélectionner des fournisseurs d’équipements de protection individuels (EPI) pendant la pandémie

Le difficile équilibre entre l’urgence et la gestion de risques

Retrouvez toutes les publications

Dans une série de publications, Deloitte Forensic revient sur les impacts business du Covid-19 et sur les démarches qu’il est possible d’entreprendre, afin de résister au choc de la pandémie et de réduire les risques de fraude et de criminalité financière.