Point de vue

3 questions à Hugues de Chaunac, Président et fondateur d’Oreca








Passionné de course automobile, Hugues de Chaunac a fondé à l’âge de 27 ans l'entreprise qui est devenue aujourd'hui Oreca, fleuron de l'industrie du sport automobile au chiffre d'affaires de 90 millions d'euros, et dont il est toujours le président. Alors que le Groupe, basé à Signes dans le Var, s'apprête à célébrer ses 50 ans cette année, Hugues de Chaunac, qui a quatre enfants, nous parle de la manière dont il a anticipé la transmission de son entreprise pour en assurer la pérennité.


 

Comment avez-vous préparé la transmission de votre entreprise sur le plan de la gouvernance ?

Dans le monde de l'automobile, la plupart des entreprises disparaissent assez rapidement après le décès de leur fondateur. Lorsque j'ai créé mon activité, je n'avais qu'un seul salarié, et j'avais dans l'idée de m'y consacrer le temps d'assouvir ma passion pour la course automobile avant de devenir sérieux et de prendre un poste dans une entreprise. 50 ans plus tard, me voici toujours animé de la même passion et toujours aussi investi dans Oreca qui, entre temps, est devenu leader mondial des voitures de course d'endurance, avec une croissance très soutenue depuis 2 ans puisque notre chiffre d'affaires est passé de 70 à 90 millions entre 2021 et 2022. La pérennité de l'entreprise est naturellement très importante pour moi et je suis très attaché au fait que la marque continue à se développer. Pour cela, je m'appuie sur mon fils Raphaël qui, après avoir travaillé dans de grands groupes, a rejoint l'entreprise il y a 20 ans. A son arrivée, Raphaël a dû gravir les échelons un à un jusqu'à atteindre le poste de directeur général qu'il occupe aujourd'hui. Il était hors de question d'imposer mon enfant aux équipes sans qu'il ait fait ses preuves. Raphaël a dû acquérir cette légitimité au fil des ans pour pouvoir travailler à mes côtés et prendre la relève dans le futur.

 

Comment votre fils a-t-il pu apporter une nouvelle approche et sa propre vision à l'entreprise ? 

En plus d'être un constructeur automobile, Oreca propose une plateforme de vente d'équipements et d'accessoires dédiés à la course automobile et aux loisirs, ainsi qu'une agence événementielle à destination des acteurs du monde de la course automobile, des diversifications que j'ai mises en place il y a 25 ans pour donner au groupe des assises plus stables. Alors que l'entreprise se développait sur tous les fronts et que j'étais davantage mobilisé sur la partie construction de voitures de course - nous réalisons environ 15 à 20 prototypes par an - Raphaël a pu faire évoluer ces deux pôles, notamment en accélérant la digitalisation de la plateforme de vente qui est devenue, en toute humilité, l'entreprise de commerce en ligne pour les passionnés de voitures. En parallèle, il a adapté nos services événementiels aux nouvelles demandes et aujourd'hui nous organisons des séminaires, des conventions et des animations pour de grands acteurs du secteur automobile. Sa vision, celle d'une nouvelle génération, a été extrêmement précieuse dans le développement de ces activités.

Raphaël a également été déterminant dans la gestion des ressources humaines, un domaine complexe où il a su insuffler de nouvelles idées. Lorsqu'il est arrivé, l'entreprise comptait une centaine de personnes. Depuis, nous avons recruté un responsable RH et nous avons pu nous agrandir davantage et plus rapidement : au cours des 18 derniers mois, nous avons ainsi recruté 80 personnes, de sorte que le Groupe compte aujourd’hui 300 salariés.Je suis quelqu'un qui a toujours été extrêmement à l'écoute et ouvert au changement, et avec Raphaël nous échangeons librement, nous sommes très complémentaires. 

 

Comment avez-vous anticipé la transmission d'un point de vue fiscal ?

Il était très important pour moi de pouvoir transmettre à mes quatre enfants ce que j'avais créé de toutes pièces et j'aurais trouvé ça terriblement injuste de ne pas pouvoir le faire dans de bonnes conditions. A cet égard, le pacte Dutreil, qui permet de préserver la pérennité de l'entreprise et de faciliter sa transmission en réduisant considérablement la fiscalité des donations, a été une grande aide. Je sais désormais que s'il devait m'arriver quelque chose, cela n'entraînerait pas un coût important en termes de droits de succession qui pourrait, comme cela arrive de temps en temps, mettre en péril la pérennité de l'entreprise. J'ai ainsi transmis une partie de mes actions à mes enfants (avec quelques parts supplémentaires à Raphaël en accord avec ses frères et sœur, compte tenu de sa responsabilité dans l'entreprise) et j'ai mis en place une charte familiale afin que chacun comprenne à la fois mes attentes et les enjeux de l'entreprise à l'avenir. Au moins une fois par an, je réunis tous les enfants pour qu’ils soient à jour des activités d’Oreca et je laisse à Raphaël le soin d'expliquer les grandes lignes stratégiques. A présent que ces choses sont réglées, je peux continuer à travailler l'esprit plus tranquille, car une chose est claire, je n'ai aucune intention de m'arrêter demain !