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Point de vue

Opérations de M&A : une vision commune pour une meilleure intégration

Par Hélène Berthier

La création de valeur au cœur de la stratégie d’intégration

La création de valeur est toujours la question centrale des stratégies de fusions-acquisitions. Les actionnaires de la cible remarquent que dans deux tiers des cas l’acquisition de leur société a in fine détruit de la valeur. Les causes d’échecs les plus fréquemment évoquées sont :

  • des estimations de synergies irréalistes sur les plans financier et opérationnel,
  • une planification sans priorités claires,
  • un processus d’intégration peu coordonné.

 

L’asymétrie d’information une fois la phase d’intégration enclenchée

Cela est dû à plusieurs raisons, dont l’asymétrie d’information entre, d’une part, les équipes en charge de la préparation et de la réalisation de l’opération et, d’autre part, les équipes devant gérer l’intégration, et le manque de pertinence et de précision des modèles financiers transactionnels réalisés par les banques d’affaires.

 

Un changement dans la gestion traditionnelle de ces opérations : le tiers de confiance

L’étude réalisée a validé l’hypothèse suivante : la création d’un business plan transactionnel et de suivi de l’intégration élaboré en amont et en commun par l’acheteur et le vendeur serait une solution aux causes courantes d’échecs des transactions M&A. L’intervention d’un tiers de confiance rémunéré à la fois par l’acheteur et le vendeur, dont la mission est de créer un modèle fiable, transparent, sécurisé et précis, permet d’accompagner les parties prenantes. Son rôle est d’amener progressivement les parties à se mettre d’accord pour définir les meilleures méthodes de valorisation et quantifier les éléments de négociation. Le modèle est construit à partir d’une vision commune d’un projet industriel ou commercial afin de définir une feuille de route partagée. Placé au cœur du processus, il est élaboré en proche collaboration avec l’acheteur et le vendeur.
Cette étude a permis d’analyser une opération au cours de laquelle Deloitte, tiers de confiance, a conseillé à la fois l’acheteur et le vendeur afin :

  • d’identifier les éléments de blocage,
  • de déterminer les multiples et les agrégats de valorisation des sociétés,
  • de coconstruire les business plans en stand-alone de chacune et de les assembler afin de modéliser un business plan commun à la fois de la transaction et de suivi de l’intégration.

Cette opération démontre que dissocier le montage de l’opération et le reflet de celle-ci dans un modèle est créateur de valeur. Le professionnel de la modélisation permet à tous les acteurs impliqués d’être familiers, non seulement avec le résultat du modèle, mais également du processus qui a conduit à ce résultat. Son livrable est un modèle fiable, transparent, robuste, adapté aux besoins et utilisable par tous : un outil d’aide à la décision durable et partagé.

 

Une source de création de valeur

Même si aujourd’hui, les cas d’application où un tiers de confiance peut élaborer un business plan en collaboration avec l’acheteur et le vendeur sont rares, la modélisation d’un business plan à la fois transactionnel et de suivi de l’opération rassemblant toutes les hypothèses est qualifié de processus utile par les clients. Il est particulièrement utile pour des transactions complexes et facilite la négociation. La valorisation, bien qu’encore réalisée par le banquier d’affaires, conseil de l’acheteur ou du vendeur, se base sur les flux extraits du modèle financier ainsi élaboré. Ainsi, la mise en commun des savoirs est créatrice de confiance.

 

Les limites de la préparation d’un business plan commun

Cette solution ne peut toutefois pas être appliquée dans le cadre d’un processus compétitif. Les conseils de la cible doivent travailler sur les offres proposées par les acquéreurs potentiels afin d’en obtenir le meilleur prix. Tant que les contours de l’opération ne sont pas définis ou que les parties n’ont pas décidé de travailler ensemble, le tiers de confiance ne peut pas être à la fois conseil de l’acheteur et du vendeur. Ensuite, il devra endosser le rôle d’arbitre et juge pour trancher sur certains points de négociation, principalement sur les marchés réglementés. Enfin, les structures de taille moyenne qui n’ont pas d’outils précis de gestion de leur activité, peuvent être les plus demandeuses de ce type de service mais elles n’auront pas toujours les capacités financières pour bénéficier à la fois de conseil M&A et de conseil en modélisation financière.

Recommandations

Ainsi, il est recommandé d’élaborer un business plan à la fois transactionnel et de suivi de l’opération dans trois contextes :

  • dans le cas d’opérations entre partenaires évidents ou dans un contexte d’exclusivité entre l’étape de la signature et le transfert de propriété et du paiement. Les parties se sont accordées sur tous les paramètres et sont plus enclines à donner accès à l’information ; 
  • ensuite, le modèle financier élaboré peut être un outil de suivi des synergies : identifier la part liée au business classique et la part liée aux synergies. Chaque mois, le modèle identifie les éléments de valeur qui permettent de distinguer les synergies de l’évolution sectorielle du business ; 
  • enfin, cette approche peut être adaptée : le business plan commun peut être transformé en boîte à outils. L’idée est de développer un outil pérenne de planification financière, préparé par le vendeur et son conseil en modélisation financière dans lequel serait prévu un module de synergies. L’acheteur potentiel pourra ainsi utiliser cet outil pour calculer la création de valeur possible à la suite de cette opération. Cela permet d’ouvrir les discussions et d’avoir un socle de négociation réaliste et représentatif du futur de la nouvelle entité créée.

Conclusion : c’est une solution pour améliorer le taux de succès des opérations de M&A

Le modèle financier transactionnel et de suivi de l’opération, élaboré en collaboration avec l’acheteur et le vendeur, devient alors une solution pour éviter les causes d’échecs classiques des opérations de fusions ou d’acquisitions mais il ne peut s’appliquer qu’à quelques contextes précis et définis. Dans un monde idéal, la systématisation du recours à un tiers de confiance pour coconstruire le business plan de l’opération serait susceptible d’améliorer le taux de succès des opérations M&A, mais de trop nombreux facteurs objectifs et subjectifs limitent trop souvent le recours à un tel conseil.