Etude

Le secteur bancaire contraint de se réinventer

Capitaux propres, essentiels pour survivre à la crise de la Covid-19

La Covid-19 amène les banques européennes à devoir résoudre des problèmes majeurs en matière de solvabilité, de liquidité et de rentabilité. Les difficultés auxquelles elles font face pourraient s’avérer encore plus sérieuses que celles rencontrées lors de la crise financière mondiale de 2008. Elles pourraient également avoir des répercussions bien plus importantes sur le long terme. Les banques ont fait de leur soutien à la lutte contre la pandémie leur priorité. Toutefois, pour que ce soutien s’inscrive dans la durée, les banques doivent rester solvables et surmonter la crise. Les fonds propres dont elles disposent seront essentiels pour relever ce défi.

Les fonds propres des banques se détérioreront rapidement

  • Le ralentissement économique sera considérablement plus violent que ceux envisagés dans les différents scénarios de simulations de crise de la banque centrale.
  • Le ratio minimal de fonds propres « durs » de certaines banques pourrait tomber en dessous de 10%.
  • Même si la tolérance en matière de réglementation pourra fournir un répit bienvenu, ces ratios devront être relevés le plus rapidement possible et à des niveaux probablement bien supérieurs à ceux d’avant.
     

Pour beaucoup de banques, le financement interne ne sera pas suffisant pour restaurer leurs ratios de solvabilité

  • Les institutions financières européennes d’importance systémique, qui étaient en moyenne à 5% de rentabilité sur leurs capitaux propres en 2019, vont être encore plus affaiblies par la baisse des taux d’intérêt qui a vocation à s’installer dans la durée.
  • Même si le paiement des dividendes était suspendu, il faudrait au minimum cinq ans pour que les bénéfices dégagés puissent permettre de rétablir les quotes-parts de capitaux-propres aux niveaux espérés avant la crise. 
  • Les banques auront besoin d’explorer toutes les options possibles afin de se reconstituer du capital et ce, en un laps de temps record. Parmi les possibilités qui s’offrent à elles, figurent la rétention de bénéfices, la restructuration d’actifs ou encore l’émission de nouveaux titres financiers. Il leur faudra faire preuve d’une grande créativité. En effet, certaines pratiques auxquelles elles avaient habituellement recours sont devenues extrêmement coûteuses. D’autres pourraient être impossibles à mettre en œuvre, comme les émissions de titres.
  • La crise financière mondiale de 2008 a démontré qu’une action résolue et anticipée est payante sur le long terme.
     

Afin de retrouver à la fois leur rentabilité économique et la confiance des investisseurs, les banques ne devront négliger aucune option de recapitalisation, pas même celle portant sur la rétention de bénéfices. Les rendements du capital devront couvrir les coûts d’investissement pour que les banques soient de nouveau crédibles.

  • Afin de reconstituer leurs capitaux propres et s’assurer une rentabilité sur le long terme, les banques devront nécessairement restructurer certains de leurs secteurs d’activité, envisager un repositionnement stratégique et réaffecter une partie de leurs capitaux.
  • Dans l’ensemble, les banques européennes n’ont pas encore complètement couvert leurs coûts d’investissement qui datent de la dernière crise financière mondiale. La moyenne pondérée de l’écart économique (= différence entre le coût du capital et le retour sur investissement du capital) des institutions financières européennes d’importance systémique était toujours d’environ 5% en 2019.
  • Pour réussir leur recapitalisation, les banques doivent convaincre les investisseurs qu’elles peuvent se relever rapidement et maintenir par la suite un écart économique positif.
  • Les jalons d’une nouvelle stratégie leur permettant d’assurer leur survie ont d’ores et déjà été posés dans la plupart des structures bancaires. Toutefois, il s’agira surtout de s’assurer que les transformations envisagées seront bien adaptées aux répercussions de la crise et garantiront une véritable solidité financière. A bien des égards, ce défi sera encore plus difficile à relever qu’auparavant.
  • Toutefois, la pandémie pourrait aussi se révéler être un formidable catalyseur pour accélérer l’émergence de modèles économiques plus performants et innovants au regard des nouvelles habitudes prises par les consommateurs et des nouvelles méthodes de travail qui ont émergé.
  • Les banques pourraient également y voir l’opportunité de développer de nouveaux services, plus adaptés à leurs clients et à la société de demain et renforcer leur réseau de franchises.
  • Elles devront également réfléchir à de nouvelles méthodes de gouvernance pour être plus souples et plus résilientes à l’avenir.
     

Il serait souhaitable que la recapitalisation des banques européennes et les transformations envisagées soient accompagnées d’une réforme structurelle de l’industrie bancaire.

  • Il est grand temps de renouer un véritable dialogue avec les investisseurs, les décideurs et les responsables politiques pour réfléchir conjointement à réformer l’industrie bancaire à plus long terme.
  • Par rapport à d’autres marchés majeurs, on constate que le système bancaire européen est saturé. Les préoccupations prudentielles et concurrentielles, tout comme les considérations politiques nationales, en ont entravé la consolidation.
  • En outre, en raison d’un marché obligataire du secteur privé sous-développé, l’Europe est très fortement dépendante des crédits bancaires pour financer les investissements des entreprises.
  • Ces éléments ont rendu les banques européennes particulièrement vulnérables en période de taux d’intérêts faibles et de dépréciation d’actifs. Cette situation rendra plus difficile la reprise économique en Europe suite à la pandémie.

Banking remade

Putting capital to work through Covid-19 and beyond