Jusqu’à maintenant, l’économie canadienne connaît une reprise en « V ». Trois questions fondamentales se posent quant à la forme de la reprise. Premièrement, les risques pour la santé au pays continueront-ils à être maîtrisés suivant la réouverture complète de l’économie? La réponse est probablement « oui », mais la nouvelle récente selon laquelle la hausse du nombre d’infections exerce des pressions sur le système de dépistage en Alberta met les risques en lumière. Deuxièmement, l’économie américaine connaîtra-t-elle une reprise vigoureuse? La réponse qui s’impose de plus en plus est « non », ce qui aura sans doute pour effet d’affaiblir les exportations canadiennes et de modérer la hausse des prix des produits de base. Troisièmement, y aura-t-il une deuxième vague d’infections à l’automne? La réponse demeure incertaine. Aussi, la récente relance économique est plus vive que prévu, ce qui augure très bien; cela dit, les risques laissent toujours présager un long rétablissement.
De façon plus précise, les ventes au détail canadiennes ont rebondi de 18,7 % en mai. Les ventes ont donc reculé de 20,0 % par rapport aux niveaux de février, mais Statistique Canada a indiqué que les résultats préliminaires de l’enquête de juin suggèrent un gain d’environ 24 %. Si les estimations rapides sont exactes, le niveau de ventes en juin serait inférieur de seulement 0,4 % par rapport aux niveaux préalables à l’arrêt complet des activités.
Ce redressement soudain reflète la réouverture de l’économie, mais sa vigueur est étonnante, puisque le virus de la COVID-19 est toujours présent, et que des preuves anecdotiques suggèrent que les consommateurs fréquentaient moins souvent les magasins et se montraient plus prudents.
Les hausses enregistrées en mai étaient généralisées, une augmentation des ventes ayant été observée dans 10 des 11 sous-secteurs. Certains des secteurs les plus durement frappés par le confinement ont affiché la plus forte croissance des ventes, notamment les véhicules automobiles, les magasins de fournitures de tout genre et les boutiques de vêtements.
Avec la réouverture des magasins, le rythme de croissance du commerce électronique a ralenti, celui‑ci ayant enregistré un gain désaisonnalisé de 0,7 % en mai par rapport à avril; mais il affiche une croissance remarquable de 113 % sur 12 mois et représente aujourd’hui 8,0 % des ventes totales du commerce de détail.
Excluant l’effet des prix, le volume des ventes au détail a crû de 17,8 % en mai, ce qui amplifie l’anticipation d’une forte croissance au cours du mois.
Par ailleurs, la construction de bâtiments a augmenté de 60 % en mai, que ce soit en valeur ou en volume, et a rebondi en partie après avoir affiché des baisses marquées en avril. La construction résidentielle s’est accrue de 57 %; la construction de logements unifamiliaux a fait un bond de 72 %, enregistrant une plus forte croissance que celle des immeubles à logements multiples, qui se chiffrait à 45 %. L’investissement dans la construction non résidentielle a progressé de 66 %. La hausse était concentrée en Ontario et au Québec. Au total, l’investissement dans la construction résidentielle et non résidentielle a récupéré près de deux tiers des pertes subies en mars et avril. Encore une fois, cela augure très bien et laisse entrevoir une forte croissance.
Au chapitre international, les nouvelles sont aussi très positives. Les dirigeants de l’Union européenne (UE) ont conclu une entente en vertu de laquelle la Commission européenne peut emprunter jusqu’à 750 milliards d’euros sur les marchés financiers afin d’offrir une aide budgétaire aux États membres. De cette somme, environ 390 milliards d’euros seront distribués sous forme de subventions, et le solde restant sera accordé sous forme de prêts pour faciliter la reprise des États membres. Près de 80 % des subventions seront attribuées au cours des trois prochaines années au moyen de la facilité pour la reprise et la résilience, qui exige que les pays élaborent un plan national de reprise où ils s’engagent à la réforme de leur économie. Le solde de 77,5 milliards d’euros en subventions permettra de soutenir les programmes budgétaires courants de l’UE. En ce qui a trait aux règles permettant de déterminer comment l’argent sera réparti, le dernier plan associe la part des sommes consacrées à la reprise à la mesure dans laquelle les pays ont été touchés par la pandémie, plutôt qu’à d’autres paramètres reposant sur la croissance et les données sur le chômage préalables à la crise.
Ce programme a été approuvé conjointement avec le budget de l’UE pour les sept prochaines années (le cadre financier pluriannuel, ou CFP), qui s’élève à 1,074 billions d’euros. Il s’agit d’un changement important, puisque les dirigeants se sont entendus sur les contributions nationales au budget de l’UE pour les années à venir, tout en accordant à la commission le pouvoir d’emprunter sur les marchés financiers pour lutter contre le ralentissement. Parmi les éléments les plus controversés de ce programme, citons les allégements obtenus par les pays « frugaux » par rapport à leur contribution budgétaire habituelle.
Enfin, comme il s’agit d’une crise sanitaire, il est encourageant d’apprendre que le développement d’un vaccin par l’Université d’Oxford donne des résultats prometteurs. Partout dans le monde, des efforts concertés sont consacrés à l’élaboration d’un vaccin efficace qui freinerait les risques pour la santé. Bien entendu, le déploiement d’un vaccin à l’échelle mondiale nécessiterait beaucoup de temps. Quoi qu’il en soit, nous nous réjouissons à l’idée que des progrès sont réalisés.