Points de vue
Ressources non conventionnelles : faire profiter l’Amérique du Sud de l’expérience canadienne
Des considérations clés pour la réussite
Les sociétés pétrolières et gazières d’exploration et de production d’Amérique du Sud peuvent tirer parti de l’expérience canadienne
Par Dave Russum
Les pays d’Amérique du Sud – qui sont désireux de développer leurs propres ressources non conventionnelles1 – vont sans nul doute se tourner vers le Nord pour obtenir des conseils et des exemples de façons de procéder. En tirant parti de l’expérience canadienne, les sociétés pétrolières et gazières d’exploration et de production d’Amérique du Sud peuvent favoriser leur succès en tenant compte de ces considérations :
- Quels sont les avantages du forage horizontal et de la fracturation hydraulique en plusieurs étapes?
- Pourquoi est-il essentiel de se concentrer sur les « sites idéaux » d’un réservoir non conventionnel?
- Quels sont les meilleurs exemples d’utilisation de nouvelles technologies pour les gisements non conventionnels canadiens?
- Pourquoi est-il crucial de déterminer les meilleures occasions ainsi que les techniques de forage les plus efficaces?
Le mois prochain, j’aurai l’honneur de donner un exposé intitulé The Paradigm Shift in Upstream Oil and Gas – Learning from the Canadian Experience, lors du congrès international de l’American Association of Petroleum Geologists qui se déroulera à Cartagena, en Colombie. Vous trouverez ci-après un aperçu relativement non technique, en plus de certaines perspectives et expériences canadiennes qui, à mon avis, pourraient être utiles en Amérique du Sud.
Il est essentiel de repérer les gisements clés et d’utiliser les techniques de forage et d’achèvement les plus efficaces pour optimiser les résultats.
Avantages du forage horizontal
Depuis 1987, plus de 40 000 puits horizontaux ont été forés (Deloitte, 2012) dans l’Ouest canadien et l'on s’attend à ce que 8 168 nouveaux puits horizontaux soient forés cette année (The Petroleum Services Association of Canada, 2013). La technique du forage horizontal a d’abord été employée pour améliorer le rendement des réservoirs traditionnels au milieu des années 1980 et elle présente plusieurs avantages, dont les suivants
- Elle permet l’accès aux « sites idéaux », soit les plus productifs des divers réservoirs;
- Elle permet la production sélective d’hydrocarbures de réservoirs ayant de l’eau souterraine;
- Elle permet aux producteurs d’extraire davantage d’hydrocarbures du pétrole lourd, du bitume et des gisements de faible perméabilité;
- Elle facilite l’injection et le soutirage rapides des réservoirs de stockage du gaz.
Dans le cas des premiers puits horizontaux, la fracturation artificielle de la roche dans les formations à faible perméabilité posait un problème pour l’industrie, car il n’existait aucun moyen de contrôler les endroits où les fractures artificielles pouvaient se produire. La capacité d’isoler des portions individuelles du puits de forage horizontal et de provoquer des fractures localisées a représenté un progrès déterminant qui a facilité l’accès au réservoir.
Trouver les « sites idéaux » du réservoir
Même si un grand nombre de réservoirs non conventionnels sont répartis dans de vastes zones, il est évident qu’il faut se concentrer sur les meilleurs emplacements du réservoir, souvent appelés « sites idéaux ». Le site idéal est en général considéré comme la portion du réservoir qui abrite la ressource la plus abondante, mais bien d’autres facteurs auront des répercussions sur la qualité d’un site idéal pour une société ou un investisseur en particulier. Ceux-ci incluent les suivants
- Propriétés de la roche;
- Type et qualité des hydrocarbures;
- Profondeur, régime de contraintes;
- Proximité des infrastructures et accès au marché.
Il est essentiel de saisir tous les aspects du projet, surtout lorsque le prix des produits est bas
L’expérience canadienne des gisements non conventionnels
Le meilleur exemple canadien de cette technologie se trouve peut-être dans la formation triasique de Montney, située dans le Centre-ouest de l’Alberta et le Nord-est de la Colombie-Britannique. La production des réservoirs traditionnels de Montney remonte à 1954 (AJM Petroleum Consultants, 2011).
Toutefois, les nouvelles technologies ont permis l’accès aux vastes quantités de gaz contenues dans la roche plus fine enfouie plus profondément dans le bassin à l’ouest, créant ainsi un des projets de production de gaz parmi les plus importants en Amérique du Nord.
La formation Duvernay en Alberta est un exemple de véritable gisement de schiste qui a capté l’attention de l’industrie au cours des dernières années. L’industrie a dépensé plus de 2 G$ pour acquérir les droits fonciers au cours de la période 2009-2011, et le forage a commencé en 2010 dans la région de Kaybob. Comme il est typique dans ces zones, le forage initial a confirmé la présence d’hydrocarbures, mais cela ne prouve pas nécessairement la viabilité économique du gisement.
La formation Duvernay présente un certain nombre d’avantages :
- Il s’agit d’une source rocheuse d’hydrocarbures confirmée;
- Les activités de forage au cours des 50 dernières années procurent l’accès à la superficie et aux installations de production;
- L’exploration et l’exploitation de la zone sous-jacente de la formation Swan Hills ont fourni l’interprétation géologique initiale et contribuent au contrôle des puits;
- Les droits miniers visaient surtout des terres publiques ouvertes, c’est pourquoi des entreprises ambitieuses ont pu acquérir de grandes parcelles de terrains adjacents;
- Certaines zones de la formation Duvernay sont surpressurisées et cela fait augmenter le volume d’hydrocarbures dans le réservoir.
Par contre, certains défis sont aussi présents :
- La formation Duvernay est relativement prfonde, soit 3 200 à 3 500 mètres, donc les coûts liés au forage et à l’achèvement des travaux dépasseront les 10 M$ par puits;
- La formation Duvernay est un gisement de schiste à très faible perméabilité, ce qui rend plus difficile la production de gaz ou de pétrole très liquide;
- La qualité du réservoir, la puissance, le régime de contraintes et la capacité de provoquer des fractures varient dans l’ensemble de la zone, c’est pourquoi il est important de connaître les conditions particulières aux zones définies.
Les exploitants prospères se distinguent du reste, car ils consacrent le temps et les sommes nécessaires pour comprendre parfaitement la nature du réservoir et déterminer les meilleures méthodes de forage et d’achèvement. Le groupe Évaluation des ressources et services-conseils de Deloitte possède une connaissance étendue de la formation Duvernay.
Le meilleur potentiel, les techniques les plus efficaces
L’utilisation de techniques de forage horizontal et de fracturation a entraîné une croissance rapide de la production de gaz naturel aux États-Unis et une chute marquée des prix du gaz naturel. Par conséquent, les producteurs canadiens optent pour des réservoirs comme celui de Duvernay, où le flux gazeux est riche en hydrocarbures liquides. Le prix plus élevé des liquides a contribué à compenser les prix du gaz plus faibles.
Ces techniques ont aussi été appliquées aux réservoirs de pétrole à faible perméabilité donnant ainsi une nouvelle vie à un bon nombre d’anciens sites, notamment les réservoirs Cardium, Viking, Bakken, Slave Point et Swan Hills. Ces réservoirs sont souvent associés à tort au schiste bitumineux; toutefois, il s’agit de pétrole brut léger classique et le réservoir est généralement composé de roches à grains plus gros que le schiste.
Les rapports concernant les taux de production initiale élevés ont suscité l’intérêt des investisseurs pour les gisements non conventionnels. Toutefois, les coûts élevés et les taux d’épuisement rapide qui y sont associés font en sorte que ces gisements sont plutôt onéreux à exploiter. Au Canada, où les coûts et l’éloignement du marché tendent à être plus élevés que pour les gisements semblables aux États-Unis, le défi est de taille. L’industrie canadienne a appris des leçons. L’optimisation des résultats en ressources non conventionnelles repose sur le repérage des meilleurs gisements. Partagez ce tweet Cette optimisation des résultats repose aussi sur l’utilisation des techniques de forage et d’achèvement les plus efficaces.
1. Le gaz naturel tiré du charbon, les sables et carbonates à gaz avare, le gaz de schiste, l’hydrate de méthane et l’huile de schiste (source : The Canadian Society for Unconventional Resources).
Dave Russum est directeur des géosciences au groupe Évaluation des ressources et services-conseils de Deloitte. Il possède plus de 30 ans d’expérience.