Comment le conseil d’administration peut aider l’entreprise à survivre

Perspectives

Comment le conseil d’administration peut aider l’entreprise à survivre

Il est plus important que jamais de se concentrer sur l’avenir

Derrière chaque équipe de direction efficace se trouve un conseil d’administration qui lui offre la supervision, les conseils et le soutien dont elle a besoin pour exécuter ses plans à long terme. Or, la pandémie a mis à rude épreuve cette relation.

Derrière chaque équipe de direction efficace se trouve un conseil d’administration qui lui offre la supervision, les conseils et le soutien dont elle a besoin pour exécuter ses plans à long terme. Or, la pandémie a mis à rude épreuve cette relation. En mars 2020, en l’espace de quelques jours seulement, tout a été bouleversé : des plans stratégiques ont été mis au rebut, des transactions ont été mises en veilleuse et de nouvelles modalités de financement ont été négociées afin de prévenir une hémorragie financière. « Cela ressemblait aux étapes du deuil », confie David Leith, administrateur de sociétés pour RF Capital Group. « Il y a d’abord eu le déni, puis la panique et enfin la réponse opérationnelle. »

Depuis le début de la pandémie, les responsabilités des conseils d’administration ont pris de l’ampleur. Habituellement, les administrateurs aident les dirigeants d’entreprise à établir les priorités stratégiques et leur posent des questions difficiles pour s’assurer que les transactions sont mûrement réfléchies et judicieuses. Ils doivent maintenant superviser, sonder, questionner et guider plus que jamais auparavant. « Il a toujours été important d’être curieux et de poser des questions de façon délibérée, explique Jonathan Goodman, associé directeur mondial de Monitor Deloitte et vice-président du Conseil de Deloitte Canada. Cela est encore plus vrai étant donné le temps et l’énergie qu’il faut déployer dans le contexte de la pandémie. »

Plus de risques à considérer

Durant les premiers jours de la crise, les conseils d’administration ont déployé d’extraordinaires efforts, que l’entreprise soit en bonne santé financière ou non. Selon Jane Kinney, membre du conseil d’administration d’Intact Financial et de Cenovus Energy, lorsque les prix du pétrole ont chuté à la fin de mars et en avril, le conseil d’administration de Cenovus a dû approuver une réduction des dividendes et des dépenses en immobilisations. « C’était une question de survie », explique-t-elle. Le conseil d’administration d’Intact, dont les circonstances financières étaient différentes, a plutôt aidé la direction à faire la transition vers le télétravail et à améliorer le service à la clientèle. « Dans ce cas, les stratégies en place ont simplement été accélérées », précise-t-elle.

D’après M. Goodman, une fois que les dirigeants ont apprivoisé les nouvelles réalités de l’exploitation d’une entreprise en temps de pandémie, les conseils d’administration se sont attelés à la tâche d’explorer les possibilités de croissance : « D’une part, il fallait aider l’entreprise à rester en affaires et, d’autre part, il fallait [encourager la direction] à agir et [l’aider] à reconnaître les occasions qui existaient. »

Il ajoute qu’au chapitre des acquisitions, le conseil d’administration doit prendre grand soin de s’assurer que l’entreprise fait les bons choix. L’exposition au risque des entreprises a atteint des niveaux qu’il n’avait jamais vus durant sa carrière, ce qu’il attribue en partie à la crise de la COVID 19, mais aussi aux nombreux facteurs économiques, technologiques et géopolitiques déjà présents et à ceux qui apparaîtront une fois la pandémie terminée. M. Leith abonde dans le même sens : « La question que nous nous posons est la suivante : comprenons-nous vraiment à quel point le contexte de risque a changé? »

Trois facteurs à garder à l’esprit

Selon M. Leith, les conseils d’administration doivent garder à l’esprit trois facteurs. Premièrement, la planification demeure un exercice incertain, tant à court qu’à long terme. En plus de subir des changements liés à la pandémie, le monde connaît des perturbations technologiques majeures, une croissance spectaculaire de la production d’énergie et des problèmes géopolitiques persistants.

Deuxièmement, comme les liquidités abondent sur le marché, il est plus facile pour les entreprises de faire des erreurs. « Habituellement, une surabondance de liquidités mène à un manque de discipline sur le plan transactionnel, note-t-il. Les conseils d’administration doivent reconnaître que nous vivons une période sans précédent sur les marchés financiers, où il y a beaucoup d’argent en circulation. »

Le troisième facteur, et souvent le plus important de l’avis de M. Goodman, est la culture d’entreprise. Si une entreprise fait l’acquisition d’une entreprise dont la culture est très différente de la sienne, les choses peuvent mal tourner rapidement. Cela est particulièrement vrai dans le contexte du travail virtuel, qui rend plus difficile l’intégration des équipes. « Le conseil d’administration doit remettre en question la direction et lui demander : êtes-vous certaine de pouvoir intégrer deux cultures d’entreprise dans un environnement virtuel? »

Le but ultime du conseil d’administration est de soutenir le chef de la direction qu’il a nommé, mais comme l’équipe de direction a tendance à trop s’enthousiasmer au sujet de certains projets d’acquisition, il doit se tenir prêt à soupeser toutes les options. « Il doit y avoir beaucoup de discussions, que ce soit au sujet de l’avenir, des incertitudes, des scénarios de référence, des scénarios les plus optimistes, de l’économie et de la majoration des prix », affirme Mme Kinney.

Planifier

La crise de la COVID-19 a mis en évidence la nécessité de la diversité entre les hommes et les femmes et la diversité raciale au sein des conseils d’administration. Bien que la situation risque de ne pas s’améliorer aussi rapidement que les gens le souhaitent, M. Goodman pense qu’au cours des prochaines années, des progrès importants peuvent être réalisés. « Nous devons nous interroger sur la diversité en ce qui a trait au genre, à l’ethnie et à la race de même que sur la diversité des parcours, des expériences et des pensées », fait-il observer.

Il ajoute qu’il est également important que les conseils d’administration prennent le temps nécessaire pour évaluer les risques futurs qui guettent l’entreprise, notamment le risque de cyberattaque majeure contre les infrastructures essentielles. Comme l’a montré la pandémie, il faut être prêt à toute éventualité. « L’imagination est une qualité essentielle dans le contexte actuel, conclut-il. Comment s’assurer d’avoir le temps et l’espace nécessaires pour prévoir les problèmes qui pourraient survenir, alors que les administrateurs disposent de si peu de temps de discussion? C’est un enjeu crucial pour des questions comme la stratégie et les fusions et acquisitions. »

 

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