La seule publication économique d’importance aujourd’hui était l’indice des prix à la consommation (IPC) du mois d’avril au Canada, qui a reculé de 0,2 % par rapport à il y a un an. Cette sombre nouvelle entraînera inévitablement des rumeurs de déflation. Toutefois, il s’agirait d’une interprétation erronée des chiffres.
La cause principale de ce recul est la chute de 24 % des prix de l’énergie sur 12 mois, notamment la baisse de 39 % du prix de l’essence. Parmi les autres reculs importants, citons la diminution de 9,8 % des services d’hébergement des voyageurs et de 4,1 % des ventes de vêtements et chaussures. En revanche, l’alimentation est l’une des catégories où les prix ont augmenté, à raison de 3,4 %.
Afin de compenser la volatilité excessive et de mieux déterminer les pressions sous-jacentes sur les prix, la Banque du Canada a créé des mesures de rechange, ou « fondamentales ». Selon ces trois paramètres, l’inflation se situe entre 1,6 et 2,0 %. Aussi, même si elle est quelque peu préoccupante, la négativité des données nominales de l’IPC ne devrait pas persister. Celle-ci est associée à une variation passagère des prix dans plusieurs catégories importantes.
Pour ce qui est de l’avenir, le ralentissement économique risque d’exercer davantage de pression à la baisse sur le prix de certains produits. Les dépenses de consommation pourraient être faibles compte tenu du taux de chômage élevé, de la baisse du revenu des ménages et des risques pour la santé. Cela pourrait donner lieu à des rabais supplémentaires pour attirer les acheteurs. Cependant, l’ajout des frais de livraison de biens et services pourrait faire contrepoids à cette mesure. Dans un contexte d’après-confinement où le virus de la COVID 19 continue de se propager, les entreprises devront sans doute engager des coûts pour assurer la distanciation physique, entre autres, afin de réduire les risques pour la santé et gagner la confiance des consommateurs. Les entreprises sont susceptibles de refiler une partie de la facture aux consommateurs, lorsque c’est possible, mais je crois que cela arrivera surtout dans le cas des produits essentiels, comme les aliments, les articles de soins personnels, etc.
Dans l’ensemble, je m’attends à ce que l’inflation de l’IPC, excluant l’énergie, ralentisse au cours des prochains mois, sans toutefois devenir négative. Le recul de l’inflation n’est pas synonyme de déflation. On parle simplement de désinflation. Et la désinflation se dissipera au fil de la reprise.
Outre les données économiques, le gouvernement du Canada a lancé officiellement aujourd’hui le crédit d’urgence pour les grands employeurs. Ce programme a été annoncé par le premier ministre la semaine dernière, mais les détails ont été confirmés aujourd’hui. Plus précisément, le programme comporte un certain nombre de conditions, dont l’interdiction de verser aux dirigeants une rémunération supérieure à un million de dollars, l’interdiction de racheter des actions et la publication des objectifs et des résultats en matière de durabilité. Même si certains jetteront un regard critique sur ces exigences, je ne crois pas que ce seront des obstacles importants pour les entreprises en difficulté. N’oubliez pas que le but du programme, c’est que le gouvernement fédéral agisse à titre de créancier en dernier recours. Ce que nous avons appris de nouveau, c’est que le gouvernement exige une garantie équivalant à une participation en capital totalisant jusqu’à 15 % du montant du capital. Cela permettra au gouvernement d’en tirer profit si l’entreprise affiche un bon rendement durant la reprise, ce qui m’apparaît équitable du point de vue du contribuable. Personnellement, je trouve cette approche plus intéressante qu’un sauvetage total ou la nationalisation.
Chez nos voisins au sud de la frontière, la Réserve fédérale a publié cet après-midi le procès-verbal de sa série de rencontres des 28 et 29 avril. Celui-ci révèle que les membres du comité considèrent que la pandémie de la COVID-19 présentait des risques importants concernant les perspectives économiques. Le procès-verbal met aussi en lumière de nombreuses préoccupations parmi les membres du Federal Open Market Committee, à savoir que l’actuelle récession pourrait entraîner des dommages à long terme pour l’économie américaine.
Les dommages économiques pourraient perdurer si le nombre de faillites monte en flèche ou que le taux de chômage demeure élevé. S’engageant à faire ce qu’il peut, tout en évoquant les limites de la politique monétaire, le FOMC a prié le Congrès de réagir avec vigueur et sans délai.
En plus de souligner la perte de compétences découlant du chômage à long terme, les participants à la réunion sont inquiets que les craintes de futures éclosions (secondaires) puissent décourager les entreprises de se lancer dans de nouveaux projets, retarder la réembauche de travailleurs ou réduire l’investissement de capitaux.
Les participants étaient également préoccupés par la possibilité de retombées des économies des marchés émergents issues de l’énorme pression exercée par la pandémie de COVID 19.
Les représentants de la Réserve fédérale se sont dits préoccupés par les pressions que les banques risquent de subir si les conditions économiques se détériorent. Ces pressions pourraient être exacerbées, selon le comité, par un niveau élevé d’endettement au sein des sociétés non financières.
Le procès-verbal fait écho aux inquiétudes que le président Jerome Powell a exprimées lors de récentes apparitions publiques. Dans le cadre de la conférence tenue à l’issue de la réunion, et dans une tentative de persuader le Congrès de passer à l’action, M. Powell s’est adressé aux nombreux Américains qui considéraient les conditions du marché du travail de l’avant-COVID comme « les meilleures de leur vie », en ajoutant qu’il était « déchirant » de voir ces progrès menacés. De toute évidence, le président de la Réserve fédérale croit que des mesures supplémentaires de stimulation budgétaire s’imposent.